Une vie, mille éclats.
Dans Scènes de vie mises en scène, Christine Reko nous livre bien plus qu’un témoignage : un théâtre intime, un récit bouleversant d’humanité où chaque souvenir s’érige comme un acte, chaque douleur comme un rôle à jouer, chaque silence comme une réplique absente qui hante les coulisses de l’enfance.
Dès les premières lignes, le lecteur est plongé dans une lumière crue : celle d’une naissance sans tendresse, d’un quotidien d’enfant « trop grande », « trop différente », souvent invisible dans une famille éclatée où l’amour parental se fait rare, lointain, presque fantomatique. L’école, les jeux, les colères paternelles, les silences maternels : tout est mis en scène avec une sincérité désarmante et une poésie brute.
Ce récit autobiographique, entre l’ombre et la lumière, navigue à travers les époques, de l’enfance dans les années 1960 à l’âge adulte, des cercles familiaux oppressants aux élans de liberté artistique. Il explore les transformations intimes, les fractures identitaires, les secrets de filiation, jusqu’à la révélation foudroyante de l’adultère maternel. « Je suis une bâtarde », murmure-t-elle, avec la lucidité douloureuse de celle qui a dû recomposer seule son arbre généalogique.
Mais Scènes de vie mises en scène n’est pas un livre de larmes. C’est un chant de résistance. Une ode à la résilience féminine. Une traversée où la narratrice transforme la souffrance en matière artistique, tisse ses blessures dans la soie des foulards qu’elle peint, ou dans les rôles qu’elle interprète au théâtre. L’art devient refuge, exutoire, renaissance.
Et puis il y a Coline, sa fille trisomique, son « amour soleil », celle qui incarne la douceur, la vérité nue, l’amour inconditionnel. Coline n’est pas seulement un personnage de ce récit, elle en est le cœur battant. Grâce à elle, Christine déconstruit les héritages de honte, désapprend la violence pour apprendre l’amour véritable.
Scènes de vie mises en scène touche une corde universelle : celle de l’enfance meurtrie, des parents défaillants, des filiations floues, des chemins qui bifurquent et des femmes qui luttent pour exister, créer, aimer malgré tout. C’est un livre pour ceux qui ont eu des enfances bancales, des mères absentes, des pères rudes. Un livre pour celles et ceux qui se cherchent encore dans les échos du passé. Avec une plume vivante, sensible et profondément humaine, Christine Reko fait résonner son vécu comme une pièce de théâtre intérieure, où le tragique côtoie la tendresse, et où chaque scène est un pas vers la lumière.